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Maniema : Chirurgie réparatrice pour 200 femmes avec fistules et prolapsus génital
2022-07-15 | Dr Justin PALUKU LUSSY

Maniema : Chirurgie réparatrice pour 200 femmes avec fistules et prolapsus génital

Deux cents (200) patientes présentant diverses pathologies gynécologiques ont été soignées lors d’une campagne gratuite de chirurgie mobile pour femmes lancée à l’Hôpital Général de Référence de Kunda à Kipaka le 06 Juin 2022 et clôturée à l’HGR de Tunda le 01 Juillet 2022, respectivement en Zones de Santé de Kunda et de Kibombo.

La campagne a été exécutée par une équipe musclée d’Uro-Gynécologie venue de l’Hôpital HEAL Africa de Goma et conduite par le Dr Justin PALUKU, Gynécologue-Obstétricien et Chirurgien des fistules, avec l’appui financier de la Banque Mondiale à travers le Fonds Social de la République Démocratique du Congo.


Entre pauvreté et culture sociale, des complications gynécologiques se développent


La fistule obstétricale demeure un problème de santé communautaire en République Démocratique du Congo, où l’UNFPA estime qu’environ 5000 nouveaux cas surviennent chaque année. Cet état des choses reste plus prononcé en milieu rural qu’en milieu urbain.

La province du Maniema est parmi celles qui présentent une prévalence élevée des pathologies découlant des complications de l’accouchement en RDC. Il est connu qu’il existe plusieurs facteurs qui favorisent la survenue des complications liées à l’accouchement, surtout dans les milieux les plus reculés. Parmi ces facteurs, on peut citer la maternité nombreuse et la pauvreté.

La polygamie, qui est fréquente au Maniema, aggrave la pauvreté. « Est assimilé aux célibataires tout homme marié à une seule femme » , a laissé entendre Junior, époux à une dame bénéficiaire de la campagne médicale tenue au mois de Juin 2022 à Kipaka. Lorsque ce fait est associé à la faible économie des ménages de la région, la femme en ressort la plus affectée, à côté de l’enfant.


Lorsqu’il faut accoucher plus pour être utile à son mari


Dans les milieux les plus coutumiers de la province du Maniema, l’importance sociale de l’homme s’évalue à l’échelle de sa progéniture. La culture locale encourage les hommes à avoir plusieurs femmes pour rester à l’écart de l’adultère. Du coup, pour être utile à son mari, une femme se doit d’avoir beaucoup d’enfants. Aussi, le quotidien du Maniema veut que la meilleure femme soit celle-là qui accouche par voie basse.

Ces filtres sociaux amènent la femme à porter autant de grossesses que possible, aussi nombreuses que rapprochées, aussi précoces que tardives. A ce niveau, les conditions favorables au développement des complications liées à l’accouchement sont réunies.

Enfin libérée d’une déchirure de périnée de 4e degré qu’elle venait d’endurer depuis 16 ans, Mme FEZA n’a su qu’elle était malade qu’à sa sixième grossesse. « Je ressentais des douleurs atroces au périnée, mais je me disais qu’il s’agissait là d’une réaction normale de l’organisme féminin à l’accouchement. C’est à la CPN, lorsque des complications se sont révélées, que les soignants m’ont mis au courant de ma maladie » , renseigne-t-elle. L’analphabétisme enfonce la femme rurale du Maniema dans un gouffre de maladies diverses.

Une bonne sensibilisation préventive au niveau communautaire réduirait sensiblement cette problématique de la fistule obstétricale et toutes ces autres complications gynécologiques liées à l’accouchement, en province du Maniema. La réhabilitation et l’équipement des structures des soins de santé améliorerait considérablement la situation de la femme rurale dans la province. Enfin, rendre disponible un personnel spécialisé serait salutaire face à cette situation qui se dresse en problème de santé publique.